Pt loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 - Nlle lect
Lundi 21 juillet 2014 – 1ère séance
Discussion générale
Ce projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale,
couplé à la loi de finances rectificative, met en application le pacte
de responsabilité et de solidarité que notre groupe a rejeté.
Nous sommes opposés à cette politique qui consiste à instaurer
toujours plus d’exonérations de cotisations sociales. Cette obstination
dans cette voie, alors que l’inefficacité des exonérations de
cotisations sociales est confirmée, rapport après rapport, est, pour
nous, incompréhensible.
Ainsi, la Cour des comptes, dans deux rapports sur les exonérations
de charges sociales transmis à la commission des finances de l’Assemblée
nationale en 2006 et 2007, exhortait les gouvernements à réduire et
mieux cibler les allégements généraux. Elle incitait à reconsidérer la
pérennité des allégements sur les bas salaires.
C’est l’inverse qui est annoncé aujourd’hui.
Quant au ministère des Finances, il précise que les 50 milliards
d’euros d’économies prévus par le programme de stabilité auraient, pour
leur part, je cite : « un impact négatif sur la croissance de 0,7 % par
an, en moyenne, entre 2015 et 2017, et pourraient entraîner la
suppression de 250 000 emplois à l’horizon 2017 ».
Ces 250 000 suppressions d’emploi sont à rapprocher des 190 000
emplois qui seraient créés grâce au pacte de responsabilité, selon M. le
ministre François Rebsamen. C’est-à-dire que le pacte de responsabilité
détruirait – au conditionnel bien sûr – plus d’emplois qu’il n’en
créerait et qu’il appauvrirait un grand nombre de nos concitoyens.
En effet, cette politique aura pour conséquence de baisser le pouvoir
d’achat, car les exonérations de cotisations sont une trappe à bas
salaire, une incitation à embaucher au minimum légal, quel que soit le
niveau de formation ou la qualité du travail exigée. De plus, les
retraites, même celles de faible niveau, sont gelées puisque cette
absence de revalorisation des pensions s’appliquerait dès 1 200 euros.
Toutes chances de relancer durablement notre économie nous semblent
hypothéquées. Pour calmer l’exaspération qui monte face à l’injustice de
cette politique qui donne toujours plus aux forts et demande toujours
plus de sacrifices aux ouvriers, aux employés et aux couches modestes et
moyennes, les cotisations salariales sur les bas salaires sont
abaissées. Il est annoncé, à l’envi, que les salariés au SMIC verront
leur salaire net annuel augmenter de 500 euros.
Mais la joie de ces salariés sera de bien courte durée lorsqu’ils
s’apercevront que les retraites de leurs parents seront gelées, que les
remboursements de leurs dépenses de santé vont diminuer, que leurs
cotisations d’assurance complémentaire ont augmenté, tout ceci venant
s’ajouter à la hausse de la TVA.
Il est prévu d’augmenter le salaire net en bas de la feuille de paie,
plutôt que de faire le choix de renforcer le vrai pouvoir d’achat des
salariés en augmentant les salaires.
Mais l’abaissement des cotisations sociales n’est pas un choix
indolore. Il n’est pas inutile de rappeler ce que sont les cotisations
sociales qui sont qualifiées indûment de charges et sont supprimées sans
plus de précautions.
Ces cotisations sociales sont une composante du salaire, il s’agit du
salaire socialisé. Donc baisser ou supprimer ces cotisations signifie
que le salaire est diminué. C’est pourquoi parler de « charges
patronales », de taxation ou de prélèvement n’a pas de sens, car il
s’agit d’un élément du salaire. Ces cotisations sont un facteur de
partage des richesses en faveur du travail, alors que depuis des années
tout va au capital.
Cet argent, auquel les salariés renoncent, sert notamment à financer
notre système de santé, des prestations sociales. Il faudra compenser
ces pertes.
Comment ces baisses de recettes seront-elles compensées ? Quels
autres budgets seront diminués, quelles prestations amputées, quels
services publics encore touchés ? Où allons-nous trouver cet argent ?
Tout au long des débats, vous avez peiné à nous donner des
explications à ce sujet. Nous savons que les compensations seront à
chercher du côté d’une réduction drastique des budgets de nos
collectivités territoriales, ce qui signifiera moins d’investissement,
donc moins de marchés publics et, par conséquent moins d’emploi.
D’ores et déjà d’ailleurs, les grandes organisations du BTP nous
alertent sur la diminution sensible de ces marchés publics des
collectivités territoriales et son impact sur l’économie du secteur.
Les compensations seront peut-être aussi trouvées du côté de nos
hôpitaux, ce qui signifie des soins de moindre qualité, portant ainsi
atteinte à l’accès aux soins et à la qualité de vie de nos concitoyens.
L’ampleur des dégâts nous sera révélée à l’automne, lorsque nous
découvrirons la loi de finances et la loi de financement de la Sécurité
sociale pour 2015.
Il n’y aura pas, hélas, de tour de magie : nous paierons ces
largesses faites aux entreprises sur nos deniers. Nous perdrons en
qualité de vie, tout cela pour des mesures qui nous paraissent
inefficaces et qu’il n’a pas été possible d’améliorer. Nous étions
pourtant plusieurs à proposer des amendements permettant de cibler les
entreprises pour lesquelles ces exonérations de cotisation et baisses
d’impôt, tel que la C3S, auraient une utilité réelle. Nous proposions
aussi que les entreprises prennent des engagements vis-à-vis des
salariés sur l’utilisation de l’argent qui leur est offert. Tout a été
rejeté en bloc, en dépit des préconisations de la Cour des comptes.
Pas un mot non plus d’un contrôle a posteriori de l’utilisation des
exonérations. Et ce n’est pas l’annonce d’un observatoire des
contreparties, qui va nous rassurer !
Le MEDEF peut dormir tranquille, il n’arrivera rien aux entreprises
qui ne jouent pas le jeu et qui distribuent cet argent public aux
actionnaires.
Pourtant, le CICE a déjà mis en exergue des versements contestables.
On apprend que Carrefour a touché 130 millions d’euros grâce au CICE et,
dans le même laps de temps, cette entreprise multiple par six les
dividendes versés aux actionnaires. Ce sont vraiment des entreprises
dans le besoin qui bénéficient de ces aides. Par exemple, Sanofi, GDF,
Total ou Orange ont touché le pactole. Nous sommes bien loin de la
petite entreprise qui peine à s’en sortir et qu’il faut en effet, elle,
impérativement aider.
Les grands gagnants de cette politique sont les actionnaires, et le
mouvement qui se dessine depuis plus de trente ans est conforté. En
effet, selon l’INSEE, de 1980 à 2010, la part des dividendes en France
est passée de 3 % de la valeur ajoutée des sociétés françaises à 9 % !
Soit du simple au triple.
En 30 ans, les dividendes ont augmenté de 200 %. Il n’est pas
impossible qu’une partie de la solution se trouve dans ces chiffres, et
non dans les milliards d’euros distribués aux employeurs, depuis des
décennies, et qui restent sans effet sur le chômage.
Pour toutes ces raisons, les députés du Front de gauche ne pourront
pas cautionner ces choix politiques qui leur paraissent injustes et
voteront donc contre ce texte.
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