mardi 18 novembre 2014

Discours d'introduction de la Conférence Nationale du PCF par Pierre Laurent: 8 novembre 2014

Cher(e)s camarades,
Notre pays, tout au long du siècle écoulé, a traversé des épreuves, il a connu des crises, des guerres, des périodes sombres où la société française s'enfonçait dans la perte de sens, l'angoisse, la colère et la peur, et où des forces rétrogrades tentaient de défaire la République et ses valeurs.
Dans ces moments difficiles - bien fou celui qui affirmerait le contraire – la France a toujours pu compter sur les communistes pour conjurer le danger et ouvrir les chemins d'une nouvelle phase d'essor de la nation, qui a souvent libéré une très grande créativité sociale. Toute l'histoire de notre parti en porte témoignage. Au lendemain de la boucherie de 14-18, dans la crise des années 30, dans la Résistance et à la Libération, face aux guerres coloniales, dans la reconstruction de la gauche après la reprise en main gaulliste de 1958, dans lesbouleversements de 68 jusqu'aux victoires nées du programme commun, dans les batailles contre le traité de Maastricht ou le Traité Constitutionnel Eeuropéen, quand Jean-Marie Le Pen a accédé au second tour de l'élection présidentielle, chaque fois les communistes ont été au rendez-vous avec les Français qui avaient décidé de ne pas subir, de refuser la fuite en avant, pour construire les chemins del'espoir vers un autre monde, une nouvelle société.
Je ne vais tourner autour du pot. Nous sommes à nouveau dans un tel moment historique pour notre pays, et pour l'Europe toute entière.
L'année 2014 a été un tournant. Avec un enfoncement dramatique dans le chômage et l'austérité, l'annonce du Pacte de responsabilité sous les applaudissements du Medef, la nomination de deux gouvernements Valls qui ont changé la nature du pouvoir et acté ouvertement la trahison des électeurs de 2012, le choc électoral des deux scrutins municipaux et européens, la décrédibilisation accélérée du Président de la République dont la piteuse émission de jeudi soir n'est qu'un énième épisode, et la prétention affichée hier par Marine Le Pen en réaction à cette émission de s'introniser « chef de l'opposition » lors du congrès du FN les 28-29 novembre à Lyon... la coupe est pleine pour cette année.
 
La France souffre, c'est une terrible évidence. Face à cette situation qui n'a pas de précédent, dans un monde en pleine mutation, notre responsabilité est à nouveau engagée.
Oui, les communistes sont une des forces qui peuvent relever le défi lancée à la démocratie et à la France. Nous sommes au coeur de ces forces. C'est donc à cette question centrale, comment prendre les initiatives politiques majeures appropriées à cette situation, que nous devons consacrer nos travaux.
Mon introduction sera brève et centrée sur les principaux enjeux de notre agenda politique.
Je souhaite que nos travaux nourrissent l'appel que je lancerai dimanche en notre nom à tous en m'adressant à la France et aux Français en conclusion de cette conférence. C'est donc conscients des périls qui pèsent sur notre pays, de ceux que lui fait courir le pouvoir en place, et déterminés à offrir une alternative de justice, de paix et de solidarité à notre peuple, que j'aborde avec vous cette conférence nationale.
La France est mal engagée, mal gouvernée, trahie par un pouvoir qui n'a ni idée nouvelle, ni ambition véritable si ce n'est de servir les intérêts des marchés, du CAC 40 et de la finance qui nous gouvernent en vérité, comme si répondre à leurs exigences toujours plus folles de rentabilité, ce qu'ils appellent la compétitivité, était un chemin pour nous sortir de la crise.
C'est l'inverse, tout le démontre : la politique suivie détruit les atouts du pays, alimente des risques nouveaux de tornade financière et économique, s'attaque violemment au modèle social, abîme la démocratie, se moque des défis environnementaux sur lesquels les experts du GIEC viennent de tirer un nouveau signal d'alarme.
La France n'a aucun avenir dans cette voie. Pire, elle a tout à perdre. Pour nous, il est hors de question de laisser le pays sombrer dans l'échec, accepter ou se résigner au scénario catastrophe programmé.
Ce qui signifie tout à la fois que nous voulons battre les politiques d'austérité et permettre à la France d'en sortir au plus vite, et que nous refusons la perspective de la descente aux enfers qui ouvrirait par réaction, une fois touché le fond des abîmes, la révolte finale.
Nous croyons à un processus de luttes permanentes. Et nous en tirons les conclusions : pour déjouer ce scénario, tous nos efforts doivent être consacrés, dans une dynamique de luttes politiques, à la construction d'une alternative de gauche.
Permettez moi d'insister : je dis bien construire une alternative de gauche, et non pas l'invoquer.
Autrement dit, se donner les moyens de luttes politiques suffisamment amples et rassembleuses aptes à construire des solutions de gauche pour sortir la France de l'austérité, à formuler les axes d'un nouveau projet politique de développement dans une nouvelle République, et indissociablement à rassembler assez de forces pour porter ces solutions, les faire gagner et les mettre en oeuvre.
Toute autre voie, je le pense sincèrement, tout raccourci avec cet effort politique ne sera dans la situation que nous connaissons qu'illusion. C'est à ce niveau que nos ambitions doivent se placer, à ce niveau très élevé mais accessible comme je m'emploierai à l'expliquer dans quelques instants.
Depuis un an, tous les choix politiques de François Hollande et de Manuel Valls ont tourné le dos à la gauche, visé sa recomposition voire sa décomposition, et assumé l'installation d'une scène politique réduite à trois acteurs : eux et leur ligne social-libérale, la droite UMP et le FN.
Ce jeu dangereux tourne au cauchemar avec leur effondrement politique. Les apprentis sorciers ne maîtrisent plus les monstres créés par leurs élucubrations idéologiques et politiciennes.
Ainsi leur disqualification croissante crée un sentiment de vide pour des millions de nos concitoyens.
La légitimité du couple Hollande-Valls est gravement atteinte. Même après la mort de Rémi Fraisse, événement gravissime et révoltant s'il en est, touchant aux fondements de ce que sont les valeurs de gauche, le gouvernement se montre incapable de s'expliquer, de dire la vérité, d'identifier les responsabilités, suscitant notamment dans la jeunesse un sentiment de révolte légitime.
Et je veux redire ici avec force, et notre indignation devant cette mort révoltante, et notre solidarité totale avec l'exigence de vérité de la famille. Nous demandons que les responsabilités soient établies et sanctionnées. Non, en 2014, en France, on ne doit pas mourir pour ses idées.
Non seulement François Hollande et Manuel Valls ne fédéreront plus les consciences de gauche de ce pays, pour peu que le second ne l'ai jamais fait et ait jamais eu l'intention de le faire, mais leurs choix politiques, les méthodes et les mots employés pour les imposer heurtent au plus profond ces consciences et sont vécus comme un véritable traumatisme par toutes celles et ceux qui ont permis la victoire sur Sarkozy et l'UMP en 2012.
Sous l'effet du renoncement assumé du pouvoir devant toute perspective de transformation sociale, à rebours de toutes les attentes populaires, la rupture se consume dangereusement entre le système institutionnel, ses représentants et la population dans sa grande masse : la privatisation progressive de l'espace public y compris maintenant dans sa dimension territoriale avec la réforme des collectivités, les attaques répétées et structurelles contre l'Etat social (retraite, code du travail, modes de représentations...) mettent à mal les valeurs et repères qui scellaient notre pacte social et républicain.
Du séisme possible, nous en avons politiquement mesuré les prémices ravageurs lors des scrutins municipaux et européens: une fracture démocratique béante, une part croissante de la population qui s'auto-exclut du débat institutionnel, refusant son cadre imposé; une extrême droite qui se nourrit de cette situation pour se positionner au coeur du débat politique et idéologique.
Je le répète : cette situation extrêmement dangereuse nous appelle au déploiement d'un immense effort de rassemblement politique pour une alternative de gauche capable de remettre en conquête les nombreuses forces disponibles laissées en friche par le pouvoir actuel.
C'est donc à une étape nouvelle, quantitativement et qualitativement nouvelle, de la démarche que nous avions engagé en créant le Front de gauche que nous sommes appelés. Une étape dans laquelle il nous incombe de prendre pour notre part en charge l'avenir de la gauche toute entière et pas seulement de la partie de la gauche que nous constituons.
Si la première et principale raison de l'affaissement du soutien aux forces de gauche et de l'écologie politique, de la difficulté du mouvement social et syndical à être à la hauteur des remises en cause sociales et des attaques de la droite et du MEDEF est à chercher dans la politique Hollande Valls, il n'en reste pas moins qu'il en va de notre responsabilité d'engager tous nos efforts politiques vers la construction d'une alternative et du rassemblement populaire et politique sans lesquels elle n'existe pas.
Oui un mouvement populaire et citoyen de tout notre peuple, car c'est de l'avenir de la France qu'il s'agit.
Dans un livre passionnant qu'il vient de publier, « les derniers jours de la Ve République », l'écrivain Christian Salmon estime que « l'après-Hollande a déjà commencé ». L'émission de TF1 vient en effet de le confirmer. Quant à Manuel Valls, il n'est pas le Premier ministre de la gauche et ne le sera jamais, mais celui d'une minorité des socialistes qui veulent abandonner le mot socialiste. Il ne s'en cache pas. Il veut tuer la gauche, et l'espoir de la transformation sociale avec elle, relançant le flirt avec Bayrou, qui vient lui de battre la gauche à Pau avec l'appui de l'UMP.
Jamais d'ailleurs on aura vu d'un gouvernement socialiste autant de mépris pour les sans emplois, les sans papiers, les « sans dents ». Les pauvres montrés du doigt, les immigrés devenus des boucs émissaires, la guerre des religions entretenue et attisée, les syndicalistes, les militants politiques, associatifs criminalisés, la finance montrée en exemple à la City… quel militant socialiste peut se reconnaître dans ce piétinement systématique des valeurs?
Nous ne laisserons pas faire. La gauche, ce n'est pas à Manuel Valls d'en fermer le cercueil, ce n'est pas sa famille, lui qui ne l'a en vérité jamais aimé. En vérité, si nous voulons éviter le retour combiné de la droite et de l'extrême droite du Front national, lui et son gouvernement devront laisser la place. C'est sans attendre que nous voulons travailler à une nouvelle majorité de gauche, un nouveau contrat de transformation social, écologique et démocratique, qui devra être mis en oeuvre par un nouveau gouvernement et un nouveau Premier ministre.
Plus tôt en seront créées les conditions, mieux vaudra pour le pays. La France est dans l'urgence.
Comment avancer dans cette direction , et est-ce tout simplement possible, accessible ? Je le pense et voudrait maintenant exposer ce que devrait être à mes yeux nos axes de réflexion durant ce week-end.
Je veux faire une première remarque. Chaque jour, et alors même que se manifestent de nouveaux signes inquiétants de la crise politique, des femmes, des hommes agissent, se révoltent, se rassemblent un peu partout dans le pays pour dire un autre avenir dans notre pays. Cette vitalité solidaire et démocratique reste considérable et , même quand tout semble se fissurer de partout, nous sommes, vous êtes, au coeur de ces forces qui relèveront le pays,
qui sauront puiser dans leur créativité et leur audace, les bases du pays nouveau qui sortira de la crise. Ce n'est pas une incantation, c'est un fait.
Les communistes sont dans les luttes à la SNCM, avec les chercheurs en marche, à Fralib, à la Belle Aude ou à Nice Matin où les salariés portent leurs projets de coopérative, avec les coiffeuses du boulevard Saint-Denis, à Renault, à PSA, à Sanofi, aux Grands Moulins Maurel, à l'Université du Puy de Dôme, à la SNCF, à Kem One, avec les manifestants de Sivens, avec ces femmes qui luttent pour l'abolition de la prostitution, à Michelin, avec les hospitaliers en lutte sur tout le territoire, avec les fonctionnaires contre la dégradation de leurs conditions de travail et du service public, à Total, avec les syndicalistes paysans et les populations pour refuser l'agriculture productiviste symbolisée par la ferme-usine des 1000 vaches, avec les lycéens sans papiers, avec les militants du peuple Kurde, avec les militants pour la paix et la reconnaissance de l'Etat Palestinien, avec celles et ceux qui manifestent contre TAFTA, à EDF, avec celles et ceux qui empêchent des expulsions locatives, avec celles et ceux qui luttent contre les coupures d'eaux et de gaz, avec celles et ceux qui luttent contre les idées du FN.
Je pourrai continuer cette liste à la Prévert. Nous serions là, encore, avec nos militants et nos élus, animés du même esprit rassembleur, constructif, avec le seul souci d'être utile à notre peuple.
Quand la France est dans la tourmente, les communistes sont au rendez-vous. Je veux, à travers vous, tous les saluer car ce n'est pas facile, parce que cela demande du courage et que nous ne sommes pas, chacune, chacun, épargnés par la crise et la dureté des conditions de vie qu'elle impose à tout notre peuple.
Mais c'est notre ADN, et notre fierté, d'être des « invincibles chevaliers, des assoiffés » pour reprendre les vers du poète turc Nazim Hikmet. Des « invincibles » qui luttent pour notre planète, son air, son eau, son sol, pour l'égalité des femmes et des hommes et pour tous les droits humains. Des « assoiffés » que ne font jamais reculer les pouvoirs de l'argent qui oppriment les peuples, qui vivent, aiment, sans savoir quand ils vont gagner, mais qui savent que cela dépend d'eux et de leurs frères et soeurs humains.
 
C'est en pensant à toutes ces femmes et tous ces hommes, à tous ces liens tissés dans le quotidien qu'il me paraît possible de nous fixer trois objectifs.
Le premier objectif pourrait être de déployer dans tout le pays, en partant de ces mille et une luttes, un puissant, large et permanent mouvement d'action pour stopper les politiques d'austérité, en sortir la France et l'Europe au plus vite, et pour imposer la relance progressive des grandes politiques sociales, industrielles, écologiques, démocratiques sans lesquelles aucune sortie de crise ne sera possible.
C'est vrai que le matraquage est incessant pour enfermer la réflexion populaire dans les dogmes libéraux sur la dette, en masquant ses causes réelles liées au cancer de la finance, sur le coût du travail, sur la protection sociale, la dépense publique et l'impôt, voués aux gémonies alors que l'une et l'autre, utilement et justement déployés, sont le socle d'un progrès social partagé.
Mais c'est vrai aussi que chaque jour qui passe atteste de l'échec profond de ces politiques libérales et du rejet qu'elle provoque chez les Français, car les gouvernements successifs, Hollande après Sarkozy, ne parviennent pas à obtenir leur adhésion. Il était frappant de voir sur TF1 comment, à l'exception de la chef d'entreprise, les trois Français choisis par TF1 continuent de réclamer au chef de l'Etat la satisfaction de besoins sociaux majeurs.
La possibilité demeure donc entière de transformer progressivement le mécontentement populaire en un puissant mouvement de demande de sortie des politiques d'austérité.
Cela exige, c'est vrai, une bataille politique et idéologique de tous les instants, mais ne nous manquons pas d'arguments.
Notre diagnostic sur la crise s'avère juste à l'inverse de toutes les prévisions à chaque fois assénées comme des vérités implacables. Et aujourd'hui, non seulement nous n'allons pas vers une sortie de crise, mais tout prépare une nouvelle séquence d'aggravation brutale de la crise du système.
L'austérité menée partout en Europe fait planer la menace d'une troisième récession depuis 2009. Le risque ne sera pas évité sans une relance massive de la demande sociale, salaires, formation, emplois et services publics, contrairement à tous les choix actuels. Et par ailleurs l'austérité allant de pair avec un soutien continu aux rendements financiers, les immenses gâchis matériels et financiers qui perdurent font craindre un nouveau krach. Les banques sont protégées, nous dit-on, mais c'est en étouffant le crédit et en protégeant leurs marges, c'est donc toujours la même fuite en avant.
La bataille pour stopper au plus vite, je dis bien stopper, les politiques d'austérité partout et chaque fois que c'est possible, doit donc s'amplifier sur tous les fronts. Il existe des majorités, une majorité de Français à rassembler pour cela. Nous devons convaincre et donner confiance, en montrant combien la France aurait gagner à cette rupture.
Sur tous les fronts, dis-je, et cela commence au quotidien dans toutes les luttes. Quand millions de personnes ne savent pas si elles vont pouvoir manger à leur faim chaque jour.
Quand 12 millions de personnes se considèrent comme mal logés. Quand 80 % de la population a peur de tomber dans la pauvreté, c'est à dire avec moins de 5 euros par jour pour se nourrir, se vêtir, se loger, se chauffer, se soigner, prendre soin des enfants, se déplacer…
Oui il y a urgence à l'action. Lutter contre l'austérité, c'est mener des actions pour créer des chaines humaines contre les expulsions, ou les coupures d'énergie, d'eau. C'est mener des actions contre les marchands de sommeil, ou les huissiers qui vivent de la misère. C'est mener des actions de solidarité avec les plus fragiles. C'est ne pas rester silencieux face aux violences que subissent de plus en plus de femmes. C'est notre capacité à nous révolter, à ne pas laisser faire l'insupportable, à construire des réseaux de solidarité dans la proximité quiouvriront le champ du possible en politique pour des millions de nos concitoyens.
Sur tous les fronts, c'est combattre la thèse du ras-le-bol fiscal qui vise en vérité à justifier les exonérations massives de cotisations sociales et les crédits d'impôts sans contrepartie pour les entreprises, les niches fiscales pour les plus fortunés, mais qui ne dit rien des véritables scandales : la TVA qui rapporte trois plus que l'impôt sur le revenu parce que ce dernier est un gruyère total quand on arrive dans les hautes tranches de revenu, et près de six fois plus que l'impôt sur les sociétés ; les grandes sociétés et les multinationales qui ne paient rien comme vient de le démontrer le scandale du Luxembourg de Monsieur Juncker ; les coupes budgétaires pour les collectivités locales qui vont obliger nombre d'entre elles à augmenter les impôts locaux si elles ne veulent pas sacrifier leurs services publics.
Sur tous les fronts, c'est en ouvrant au grand jour les comptes des banques et exiger le changement des politiques du crédit, rationnées pour la demande sociale et les PME, généreuses pour la finance, comme vont le faire les camarades de Paris mercredi soir devant la banque BNP-Paribas, comme nous devrions le faire partout en exigeant un moratoire du paiement des intérêts bancaires pour les collectivités locales mises en difficulté par les suppressions de dotations budgétaires.
Sur tous les fronts, c'est en menant partout une bataille de vérité sur les gâchis du CICE et du crédit d'impôt recherche. J'ai en tête cette entreprise verrière près de Dieppe, qui fabrique les flacons pour les parfums des grands groupes de luxe, et qui voit une partie non négligeable des millions touchés remonter de fait vers les profits de ces groupes. Chacun a des exemples de l'indécence de ces cadeaux.
Oui, il faut partout demander des comptes aux entreprises, aux banques et à l'Etat.
Je ne vais pas plus loin. Je pourrais parler de toutes les luttes pour les droits des femmes, pour les services et la protection sociale, pour le logement et le scandale des aides fiscales à la promotion spéculative qui continue de plus belle tandis que la construction sociale reste en panne. Vous m'avez compris.
C'est à cette première question qu'il nous faut travailler : quelles campagnes durables ? quelles initiatives construire pour que grandisse dans le pays un mouvement irrésistible de mise en cause des politiques d'austérité, jusqu'à les stopper, pour d'autres solutions ?
La journée d'action du 15 novembre décidée par le collectif 3A créé à l'issue de la manifestation que nous avions initié le 12 avril est une étape. La manifestation des chômeurs le 6 décembre en est une autre. Mais il faut construire dans la durée, dans tout le pays, dans toutes les dimensions.
La crise institutionnelle et démocratique est, je l'ai dit, une dimension constitutive de la crise globale. La République est attaquée dans tous ses fondements, les institutions, la politique comme espace de délibération publique et citoyenne, les valeurs. Du même coup, la solution à la crise, c'est aussi et inséparablement une nouvelle République, une sixième République.
La réforme territoriale est un enjeu central comme le sont la démocratie et les droits nouveaux dans l'entreprise. Les élections départementales et régionales de 2015 nous donnent l'occasion d'une bataille nationale et populaire sur ces enjeux démocratiques fondamentaux.
Nous avons en vue d'autres rendez-vous structurants. La préparation de la conférence sur le climat qui se tiendra à Paris en décembre 2015 prend d'autant plus d'importance après le nouveau rapport alarmiste du GIEC. La question écologique est au coeur de notre combat pour un nouveau modèle de développement.
La convention nationale pour une nouvelle industrialisation que nous réunirons les 22 et 23 novembre sera également essentielle. Je cite également les nouvelles rencontres Niemeyer sur la ville que nous tiendrons en janvier 2015 sur le thème de la mobilité.
La bataille que nous menons pour une sortie de crise ne saurait se concevoir hors d'une bataille solidaire menée dans toutes l'Europe. En Europe, tous les voyants sont au rouge et font courir, singulièrement au sud, un grave risque de déflation dans la zone euro. Mais des voyants de lutte s'allument aussi au vert où après la Grèce et l'Espagne, c'est au tour de l'Italie et de la Belgique de connaître à leur tour des réveils de mobilisation très importants.
Il n'y aura pas de sortie de l'austérité en France sans bataille pour l'indépendance économique. Mais il n'y a pas non plus de salut dans le repli et la concurrence nationaliste : notre bataille doit être à la fois française et européenne. La suspension de l'application du traité budgétaire au profit d'un plan de relance sociale massive peut devenir une exigence européenne.
En mai prochain, cela fera 10 ans que la France a dit Non au Traité constitutionnel européen.
C'est l'anniversaire d'une époustouflante campagne citoyenne, d'un débat de fond qui a structuré la ligne rouge entre les libéraux et la majorité du peuple français, une lutte que nous avons gagnée et qui trouve aujourd'hui son prolongement dans la bataille contre l'austérité. Le PGE vient de confirmer sa décision de tenir à Paris les 30 et 31 mai prochain sur proposition du PCF un grand Forum européen des alternatives. En 2005, nous avons dit non. L'esprit du non est toujours là. Mais nous allons plus loin : en 2015, une alternative de gauche européenne se construit.
Ce Forum européen des alternatives réunira des forces politiques de tous les pays européens, des forces sociales, syndicales, des intellectuels, des citoyens prêts à refonder l'Europe. Notez bien cette initiative à vos agendas.
L'année 2015 pourrait bien être une année d'accélération de la bataille européenne. La Grèce pourrait connaître des élections législatives. Que ferait la France face à une très probable victoire de Syriza ? S'engagerait alors un énorme bras de fer intéressant toutes les forces sociales et démocratiques européennes. Nous devons nous y préparer pas seulement par solidarité avec le peuple grec mais parce qu'une victoire d'Alexis Tsipras pourrait ouvrir une brèche, un espoir pour l'ensemble de l'Europe, et devenir un élément majeur de crédibilisation de notre projet en France. Avant cela, le 24 janvier se tiendra à Barcelone un forum du sud de l'Europe pour une sortie de crise par le social, à l'initiative des camarades espagnols et grecs.
Vous le voyez, c'est une bataille d'ensemble, multiforme qu'il nous faut faire grandir pour demander l'arrêt immédiat des politiques d'austérité et le lancement d'un programme de relance sociale, de développement des services publics, d'investissements industriels et écologiques, de reconquête de nos politiques bancaires, monétaires et financières.
Toute notre bataille contre l'austérité ne vise pas seulement à changer de cap. Il s'agit de changer de logiciel pour le développement de la société, pour l'avenir de la planète et du monde. La sortie de la crise très profonde de tout le système capitaliste financiarisé doit être pour nous celle de l'invention d'une nouvelle société.
Nous avons entrepris après notre dernier congrès de remettre en chantier tout notre projet. Un travail important a déjà été accompli. Nous le poursuivons, nos conventions nationales y contribuent et nous aboutirons au premier semestre 2016 avant notre prochain congrès à une convention nationale rassemblant l'ensemble. Je lancerai demain un appel au travail commun de toutes les forces sociales, politiques, intellectuelles disponibles pour le refondation d'un tel projet dont j'avais dit au dernier congrès qu'il était en quelque sorte notre communisme de nouvelle génération.
Le second objectif sur lequel nous pourrions nous accorder est de faire avancer dans toutes ces batailles les rassemblements et les constructions politiques capables de porter jusqu'au pouvoir ces alternatives.
Notre ambition politique passe par la nécessité de construire, dans la durée, un mouvement social et politique d'ampleur capable de mettre en échec le choix de l'austérité et de promouvoir un nouveau chemin de redressement national. Ce mouvement, à l'échelle nécessaire, fait encore défaut.
Bien sûr, nous avons construit le Front de gauche, mais avec des résultats encore trop insuffisants. Bien sûr des mobilisations se multiplient, émergent de nouveaux terrains de luttes posant publiquement des questions structurantes telles celle de l'appropriation publique sociale et publique, des équilibres environnementaux et de l'éco système , de la République, de l'égalité des droits... Reste que le poids du fatalisme pèse aussi fortement sur le champ des
luttes sociales, sur les mobilisations et l'unité syndicale; persiste la difficulté à faire converger les luttes, leur donner un caractère de masse, rendre incontournables des exigences transformatrices.
C'est à quoi je vous invite à travailler en démultipliant nos initiatives politiques pour que se rencontrent, échangent et scellent des bases communes l'ensemble des forces politiques et sociales, hommes et femmes partisans de la rupture avec l'austérité et disponibles pour une alternative politique de justice. Notre Parti s'est engagé dans ce sens dès le débat de l'été, je me suis engagé personnellement pour que se créent de telles passerelles: la fête de l'Humanité, les rencontres qui y ont eu lieu et les premiers signes donnés ont constitué un premier signal fort pour une remobilisation de la gauche, ainsi que la réunion nationale du 7 septembre dernier pour une relance du FDG.
Rien ne peut pourtant en rester là. L'accélération de la situation politique nous appelle à franchir une étape politique pour sortir de la crise de perspective. Sauf à y parvenir rapidement c'est l'ensemble du mouvement progressiste qui est menacé d'atomisation et de difficulté majeure.
C'est d'ailleurs sur cette faiblesse espérée que misent Hollande et Valls pour présenter comme inéluctable leur choix de soumission à la finance. Ils se heurtent toutefois à de fortes résistances dans leur camp et l'issue de cet affrontement au sein du PS impactera directement l'ensemble de la gauche. Des débats d'une autre nature mais tout aussi vifs existent au sein des écologistes et d'une certaine manière au sein de toutes les familles de la gauche sociale et politique. Nous sommes d'ailleurs de toutes ces forces aujourd'hui la plus unie, et donc un des plus solides points d'appui.
C'est pourquoi à mes yeux le travail du Front de gauche, la nécessité d'en élargir l'ambition de rassemblement relève de la même exigence que celle de poursuivre dans la durée l'effort de dialogue et de convergence des énergies existantes dans la gauche pour l'alternative. C'est une seule et même question si nous voulons réussir à construire une alternative qui pèse réellement le poids.
C'est donc une bataille et des initiatives qui doivent se déployer sur tout le territoire sans attendre la fumée blanche d'un repas à la fête de l'Humanité, d'une assemblée générale du Front de gauche ou d'un vote des frondeurs au Parlement. La question n'est pas non plus ou les frondeurs , ou le Front de gauche. La question est : l'alternative gagnante.
Le défi essentiel est de favoriser l appropriation populaire de l' espace politique pour donner une majorité au rassemblement pour l'alternative, favoriser cette bascule d'hommes et de femmes de gauche, d'électeurs et militants socialistes, écologistes, syndicalistes, associatifs qui le permettront.
C'est à partir de cette ambition que nous devons nous réapproprier l'activité du Front de gauche. C'est pour cela que j'appelle l'ensemble des organisations du Parti à s'investir dans la préparation et la co-organisation d'assises citoyennes sur tout le territoire que venons de décider dans le Front de gauche pour stopper l'austérité et pour une alternative de transformation sociale.
Mon propos ne vise pas ici à minorer la crise traversée ces derniers mois par le Front de gauche, le débat stratégique qui continue à le traverser. Ce débat se poursuit. Il porte sur notre rapport au mouvement populaire et à la gauche dans le moment politique.
C'est donc en poursuivant ce débat mais conscient de la place et du rôle qu' a construit le Front de gauche et des exigences de construction de la période que nous voulons avancer. C'est de la même manière conscient de ces débats que nous devons continuer à prendre des initiatives de contacts et de convergences multiformes dans toute la gauche. Nous pouvons et savons le faire en étant nous mêmes, décomplexés, unitaires, autonomes.
Avec en toutes circonstances un objectif : être une force à l'offensive politique sur le terrain de la résistance et du rassemblement.
Les 1000 rencontres pour l'alternative, que nous avons nous même commencé à organiser sont à la disposition de ce processus général de construction d'une gauche de transformation et de progrès. C'est ainsi que tout naturellement nous posons la question à nos partenaires du Front de gauche de relayer cette initiative. Je sais que des camarades qui en ont déjà tenues souhaitent faire part de leurs expériences et des premières leçons qu'ils en tirent.
Pour amplifier cette démarche, nous avons également décidé que je réaliserai un tour de France des régions qui débutera en janvier et se déroulera sous la forme de visite de trois jours pleins dans chacune des nouvelles régions administratives. Je ferai ce tour des régions pour rencontrer simplement la France qui innove, qui galère, qui étudie, qui travaille ou qui cherche un emploi, la France qui invente, qui créé, qui bouge, qui rêve, qui se cultive. Cette France, avec sa population métissée, ses origines, et ses histoires différentes, j'irai à sa rencontre avec vous, les militants de notre parti. Ensemble, nous écouterons le peuple de France, nous travaillerons avec lui sur le terrain nos propositions, nous débattrons de l'alternative nécessaire au pays.
La tenue de ces initiatives sera aussi notre contribution à la construction du processus d'Assises initiées par le Front de gauche.
(...)
Ces assises pourront donc se développer dans des rencontres locales alternant avec de grandes initiatives décentralisées qui nationaliseront la démarche en même temps qu'elles ponctueront sa progressivité. De fait, ce processus d'assises n'a pas vocation à rester la propriété ou dans l'étiage du Front de Gauche mais à devenir un processus initié, animé et maîtrisé par l'ensemble des forces et personnalités politiques, sociales et culturelles qui le souhaiteront car se retrouvant dans la démarche et ses objectifs de transformation sociale.
Comme ce processus interviendra dans une année électorale, je crois utile de préciser que la participation à ces assises n’est pas conditionnée par un accord sur les questions de stratégie électorale mais qu'il sera utile bien évidemment à optimiser les convergences possibles sur le champ politique.
(...)
Je voudrais terminer mon propos introductif en évoquant un troisième objectif : les élections départementales qui se tiendront en mars 2015, avant les régionales en décembre.
Compte tenu des évolutions politiques dont je viens de parler et des ambitions que sont les nôtres, elles changent de caractère. Elles n'auront d'ailleurs pas l'objectif que leur avaient assigné le gouvernement en imaginant dès 2012 un mode de scrutin et des redécoupages qu' il envisageait alors à son avantage. D'autant qu'entre temps, la disparition des départements a été programmée par ce même gouvernement.
Mais changeant de caractère, elles n'en auront pas moins d'importance, au contraire. Pour la première fois, il s'agira donc d'une élection nationale, avec un nouveau découpage des cantons, et avec pour chaque canton 2 titulaires et 2 suppléants à parité. C'est le prochain rendez-vous grandeur nature avec les Français. Pour nous, dans ces conditions, je crois que l'objectif doit être clair : protéger les politiques publiques, les services publics, les espaces démocratiques contre les politiques d'austérité et faire de cette élection un grand moment de mobilisation sur ces enjeux et sur la réforme territoriale, une grand moment de construction du rassemblement pour des alternatives.
Même si l'objectif est élevé, nous pourrions viser la construction de candidatures dans tous les cantons, en tous cas le maximum., le meilleur score national possible en forte progression partout où c'est possible, l'élection de nombreux conseillers départementaux. Nous pouvons nous retrouver dans de nombreux cantons première force de gauche, être un rempart face à la droite et l'extrême droite dans de nombreux autres. Ce serait une bonne nouvelle face aux dangers d'une droite et de son extrême qui vise à fair basculer tous les pouvoirs locaux dès 2015. Cela donnerait du souffle à des millions de progressistes dans notre pays. Cela donnerait de la crédibilité et de la force à notre construction alternative. Les élections départementales, sont donc une étape importante dans notre stratégie de rassemblement, de lutte contre l'austérité. Je le dis également sans faux semblant, rien n'est gagné, mais c'est possible. Il faut donc s'en donner les moyens à commencer par la construction des candidatures, quatre par canton.
Avec les élections départementales, nous voulons changer le pouvoir, en proposant de nouveaux visages qui symbolisent ce que nous voulons comme rassemblement. Les individus personnifient une politique, il nous faut donc être très attentifs vis à vis de celles et ceux qui vont porter nos couleurs. C'est ce qui permet de montrer qualitativement ce que nous voulons, ce que nous proposons au suffrage. Il nous faut des femmes et des hommes, à parité, qui vont défendre l'idée de la démocratie locale. Il y a besoin d'élu-e-s proches des gens, qui travaillent dans la proximité, qui associent les citoyens dans la décision. Face aux projets gouvernementaux de métropoles, de super régions qui éloignent les gens des centres de décisions, ils doivent pouvoir compter sur des candidats qui leur ressemblent et sur qui ils vont pouvoir compter. Ils ont ainsi besoin d'élus qui vont défendre les services publics, capables de proposer et de créer de nouveaux services publics. Contre ceux qui rêvent de faire un hold-up sur les 72 milliards d'euros que gèrent les départements, nous pensons par exemple que le département est le bon échelon pour proposer de créer un grand service public d'aide à la personne qui ne laisse pas ces services au seul privé. Nos candidatures, celles que nous soutiendrons doivent oxygéner la politique, mêler l'expérience et la jeunesse, être à l'image de la France aujourd'hui ignorée des possédants et des gouvernants...
En menant de front un mouvement d'ampleur de luttes contre l'austérité et pour la relance sociale, jusqu'à mettre en échec les politiques dont ne veulent plus les Français, en travaillant à un large effort de construction politique, et en faisant des élections départementales un moment d'avancée significative de ces démarches, je crois que nous pouvons transformer l' année 2015 pour en faire non une année de nouvelles amertumes, mais une année utile à l'alternative dans l'intérêt de notre peuple.
(...)
Les chemins sont complexes, difficiles, mais « aux invincibles chevaliers, aux assoiffés» de bonheur que nous sommes , rien n'est impossible. Le dicton dit lui qu' « à l'impossible nul n'est tenu », mais cette fois ci mes camarades, nous y voilà tenus.

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